La Cour Européenne des Droits de l’Homme vient de se prononcer sur le droit de visite et d’hébergement du tiers ayant élevé l’enfant.
La décision rendue le 12 novembre 2020 semble être le dernier épisode d’une saga qui a agité les juridictions françaises pendant près d’une décennie.
Madame H. et Madame C. ont vécu ensemble de 2000 à 2012. D’abord en concubinage, puis dans le cadre d’un PACS.
Durant la vie commune, elles ont eu un enfant né en 2007. La naissance de cet enfant faisait suite à une procréation médicalement assistée réalisée en Belgique.
Les deux femmes ont élevé ensemble cet enfant pendant plusieurs années.
Au moment de leur séparation, la mère biologique de l’enfant refusait cependant que son ex-compagne maintienne les liens avec l’enfant.
Le Juge aux Affaires Familiales était saisi d’une demande de droit de visite et d’hébergement sur le fondement de l’article 371-4 du code civil.
Cet article précise en son aliéna 2 que « si tel est l’intérêt de l’enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l’enfant et un tiers, parent ou non, en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l’un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables ».
Dans un arrêt du 5 juin 2014, la cour d’appel de Paris refusait tout droit de visite et d’hébergement à l’ex-partenaire de la mère. Elle considérait que la poursuite des relations n’étaient pas dans l’intérêt de l’enfant.
Suite à ces décisions, Madame C. a formé un pourvoi en cassation. Elle soulevait notamment une atteinte au droit au respect de sa vie familiale. Ce droit est, en effet, garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi dans un arrêt du 7 octobre 2015.
C’est dans ce contexte que Madame C. a saisi la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
Elle reprenait son argumentaire développé devant les juridictions françaises. Selon elle, le refus de lui accorder un droit de visite et d’hébergement à l’égard de l’enfant de son ex-compagne, qu’elle avait élevé pendant les premières années de sa vie, constituerait une violation de son droit au respect de sa vie familiale.
Dans son arrêt rendu le 12 novembre 2020, la CEDH tranche la question. Elle affirme que l’intérêt de l’enfant doit primer sur le droit au respect de la vie familiale du tiers. Par conséquent, ce raisonnement approuve le système français reposant sur l’article 371-4 du code civil.
Ainsi, les relations entre l’enfant et le « parent social », qui sont parfaitement reconnues par l’État français, entrent dans le champ d’application de la protection garantie par l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme. La Cour rappelle cependant que dans la recherche de l’équilibre entre les intérêts en présence, l’intérêt supérieur de l’enfant doit toujours primer.
Les dispositions légales françaises sont donc jugées suffisantes pour permettre de garantir le droit au respect de la vie familiale.
Toutefois, le système français semble aujourd’hui mal adapté. La situation particulière du projet parental mené en commun par des couples homoparentaux pose difficulté.
Une évolution législative est en discussion. Elle doit permettre l’établissement d’un double lien de filiation. Cela se ferait en amont de la naissance de l’enfant. Cela permettrait de régler les difficultés en cas de recours à une procréation médicalement assistée dans les couples de femmes.
Mise à jour : voir l’article « Enfin une réforme de la procréation médicalement assistée ! »